Antonio Guterres: Covid-19 menace l’humanité toute entière
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est inquiété mercredi de l’expansion de la pandémie tandis que plus de trois milliards de personnes sont appelées à rester confinées.
L’expansion de la maladie Covid-19, qui a désormais plus tué en Espagne qu’en Chine, «menace l’humanité toute entière», a averti mercredi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.
Plus de trois milliards de personnes, soit plus du tiers de l’humanité (évaluée par l’ONU à 7,8 milliards de personnes en 2020), sont désormais appelées à rester confinées. Une mesure obligatoire dans la grande majorité des cas, aux lourdes conséquences économiques et sociales.
Face à la menace du coronavirus, «l’ensemble de l’humanité doit riposter. Une action et une solidarité mondiales sont cruciales», a souligné Antonio Guterres en lançant mercredi un «plan de réponse humanitaire mondial» destiné notamment à aider les pays les plus pauvres.
De leur côté, FMI et Banque mondiale ont appelé les créanciers bilatéraux à geler les remboursements de dettes des nations les moins favorisées.
Le nouveau coronavirus a déjà tué plus de 20’000 personnes dans le monde, dont plus de 13’000 en Europe.
C’est «pire qu’une guerre», constate Orlando Gualdi, maire de Vertova, village du Nord de l’Italie où le virus a fait plus de morts que la Seconde Guerre mondiale.
Si les nouveaux cas continuent de stagner, l’Italie reste le pays le plus touché au monde avec 7503 décès. Elle est suivie désormais par l’Espagne, où le nombre total de morts – 3434 – a dépassé mercredi celui en Chine (3281), berceau de l’épidémie.
Comme dans les autres pays européens les plus touchés, des hôpitaux espagnols sont au bord de l’effondrement, les personnels médicaux exténués et exposés à la contagion par manque d’équipements adaptés.
L’Espagne va donc acheter pour 432 millions de dollars (environ 421 millions de francs) de matériel sanitaire – masques, gants, respirateurs, tests… – à la Chine, où la maladie a très fortement ralenti sa progression.
«Beaucoup de collègues pleurent car des gens meurent seuls, sans avoir revu leur famille, et nous avons à peine le temps de leur tenir compagnie», confie Guillen del Barrio, infirmier dans un hôpital saturé de Madrid.
La France va elle mettre en place un «pont aérien» avec la Chine, pour faire venir les millions de masques de protection dont elle manque également.
Deuxième pays le plus peuplé du monde derrière la Chine, l’Inde (officiellement 519 cas, dont 10 mortels) a confiné à son tour mercredi ses 1,3 milliard d’habitants.
Dans les rues vides de New Delhi, le pépiement des oiseaux a remplacé l’habituelle cacophonie de klaxons et de cris. A Bombay, Rafiq Ansari, marchand de légumes, s’inquiète de futures «pénuries» car il est «de plus en plus difficile de s’approvisionner».
La Colombie a également ordonné à ses 48 millions d’habitants de rester confinés à compter de mercredi. Et l’Iran, l’un des pays les plus affectés avec 2077 morts recensés, s’apprête à interdire, d’ici vendredi, la circulation entre les villes du pays.
En Arabie saoudite, Ryad et les deux villes saintes de Médine et La Mecque sont désormais en quarantaine et le couvre-feu déjà en vigueur a été allongé.
La semaine prochaine sera chômée en Russie, où le président Vladimir Poutine a appelé ses concitoyens à «rester à la maison», sans toutefois l’ordonner. Il a aussi reporté un vote populaire prévu en avril sur une réforme constitutionnelle.
La Russie, où aucun décès directement lié au coronavirus n’a été officiellement confirmé, a annoncé mercredi que deux patients contaminés avaient succombé, sans toutefois préciser la cause exacte de leur décès.
En Grande-Bretagne, confinée depuis mardi, plus de 400’000 personnes se sont portées volontaires, à l’appel du gouvernement, pour venir en aide aux plus vulnérables.
Mais le confinement est souvent compliqué à mettre en oeuvre. Comme dans le plus important camp de migrants d’Europe, à Moria, sur l’île grecque de Lesbos, qui fait figure de «bombe sanitaire».
«On nous a dit de ne pas sortir de nos tentes et de ne pas nous rassembler, mais c’est impossible à Moria», explique un migrant somalien, Ibrahim Mohament Hussein.
A l’inverse, en Chine, où les nouvelles contaminations locales sont quasi-nulles ces derniers jours, les restrictions drastiques imposées depuis des mois dans la province du Hubei, épicentre de la pandémie, ont été levées mercredi, sauf dans la capitale régionale Wuhan, provoquant des embouteillages et une ruée sur trains et autocars.
La pandémie devrait entraîner une récession globale des économies des 20 pays les plus industrialisés (G20) du monde, a averti mercredi l’agence de notation Moody’s.
Pour tenter d’enrayer les ravages économiques, la Maison Blanche et le Sénat américain ont trouvé un accord sur un plan destiné à mobiliser 2000 milliards de dollars (environ 1950 milliards de francs) en soutien à la première économie du monde.
L’annonce a redonné mercredi des couleurs aux bourses en Asie, en Europe qui ont conforté leur rebond de la veille, Wall Street prenant la même direction.
L’Allemagne a elle adopté un arsenal de mesures représentant presque 1100 milliards d’euros (environ 1170 milliards de francs) pour soutenir entreprises, travailleurs et système de santé.
A la veille d’un sommet européen par vidéoconférence, les dirigeants de neuf pays de la zone euro, dont France, Italie et Espagne, ont réclamé plus de solidarité, via notamment l’émission de «corona bonds» – un emprunt commun à l’UE -, mettant la pression sur l’Allemagne, opposée à toute mutualisation des dettes.
Dans les pays pauvres, les plus précaires sont touchés et des secteurs entiers menacés. Au Kenya, par exemple les exportations de roses vers l’Europe s’effondrent, menaçant de ruiner un secteur prometteur. «C’est tellement triste. C’est comme jeter de l’argent», se lamente Sarah, employée horticole devant des brassées de fleurs splendides envoyées à la décharge.
En Afrique, la maladie Covid-19 a en outre désormais atteint Mali et Libye, deux pays où la guerre augmente l’inquiétude liée aux limites des systèmes sanitaires du continent.
L’ONU s’inquiète également que le virus fasse des «ravages» dans les prisons à travers le monde et appelle à la libération de détenus.
Rare effet positif du confinement: la pollution de l’air diminue en Italie, comme dans le reste de l’Europe, selon l’Agence européenne de l’environnement.
par: Arab Observer