L’ombre de Daech plane sur la Syrie
L’histoire de Daech (l’État islamique autonome) a complètement changé le 25 octobre 2019. Ce jour-là, Abu Bakr al Bagdadi, le chef de cette organisation terroriste, a perdu la vie lors d’une opération militaire menée par un commandement des forces spéciales américaines dans un village du nord-ouest de la Syrie. La pandémie provoquée par le nouveau coronavirus a transformé le paysage géostratégique, reléguant au second plan les conflits qui ont été pendant un temps au centre du débat politique et médiatique. La lutte contre Daech en Syrie, en Irak et ailleurs n’a pas été une exception, provoquant la résurgence de cette organisation terroriste dans certains territoires comme la Syrie, où Daech a lancé ce dimanche une nouvelle attaque contre les forces de l’armée arabe syrienne (SAA) dans la campagne de Deir Ezzor.
L’Observatoire syrien des droits de l’homme (SOHR, par son acronyme en anglais) a souligné que Daech a attaqué les positions de l’armée syrienne dans la région de Badiya al-Mayadeen, provoquant de graves affrontements dans une zone déjà dévastée par le conflit. Selon cette organisation, au moins huit soldats du régime ont perdu la vie dans cette attaque, qui a eu lieu dans la région d’Al-Mazare, l’une des régions où se trouve la plus forte concentration de forces iraniennes et de milices fidèles au régime. Cependant, le SOHR a souligné que « ni Daech n’a attaqué les positions iraniennes ni les Iraniens n’ont soutenu les milices du régime pour repousser l’attaque ».
Syrie et en Irak, et exceptionnellement en Libye. Après cette attaque, les forces de cette organisation terroriste ont disparu dans le vaste désert syrien, selon le journal numérique Al Masdar News. Compte tenu de la présence de Daech dans cette région, l’armée syrienne, l’armée irakienne (avec Hashd Al-Shaabi) et les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont lancé une série d’opérations pour mettre fin à ce groupe terroriste.
Depuis le 24 mars 2019, le SOHR a documenté le meurtre d’au moins 570 soldats du régime et de milices fidèles au régime de nationalités syrienne et non syrienne, dont au moins deux Russes, et de 127 milices soutenues par l’Iran. Tous ont été tués dans des attaques, des bombardements et des embuscades de Daech, à l’ouest de l’Euphrate, dans les déserts de Deir Ezzor, Homs et Al-Suwaidaa.
L’agence – basée à Londres et un réseau d’informateurs sur le sol syrien – a également enregistré la mort d’au moins quatre civils travaillant dans des champs de gaz, et de onze bergers. Le SOHR a également fait état de la mort d’au moins 212 membres de Daech aux mêmes dates dans des attaques ou des attentats à la bombe. Suite à cette attaque, Daech a lancé une autre attaque sur les positions de la Force de défense nationale (FDN) soutenue par le régime dans le désert d’Al-Bolil, dans la zone rurale de Deir Ezzor, tuant trois personnes.
Dans ce scénario d’instabilité marqué par une triple crise (politique, sociale et économique), le président syrien Bachar al-Assad – qui bénéficie du soutien de la Russie et de l’Iran – avance dans son objectif de récupérer chaque centimètre du territoire syrien, y compris le gouvernorat d’Idlib, dans le nord-ouest du pays. Dans le dernier bastion des forces rebelles, le groupe terroriste Tahrir al-Sham et l’Armée libre syrienne (FSA) tiennent leurs positions, soutenus par les forces militaires turques. Les hostilités dans cette région ont conduit Ankara et Moscou à signer un document précisant les termes de la cessation des hostilités. En vertu de cet accord, les forces armées russes et turques ont commencé à effectuer des patrouilles conjointes le long de l’autoroute reliant Alep à Damas ou de la route reliant Alep à Laatheque.
Entre-temps, le ministère français des Affaires étrangères a annoncé lundi son intention de rapatrier dix enfants de terroristes français qui étaient piégés dans des camps dans le nord-ouest du pays. L’agence de presse EFE a souligné que la décision de les transférer en France est justifiée par « la situation de vulnérabilité de ces enfants et dans le cadre des autorisations données par les autorités locales ».
Le coronavirus est une menace pour les accords de coopération internationale, qui sont cruciaux pour la lutte contre le Daech, tant en Syrie que dans d’autres régions comme le Sahel, le bassin du lac Tchad ou l’Afghanistan. Vladimir Voronkov, secrétaire général adjoint de l’Office des Nations unies contre le terrorisme, a averti en février dernier que ce groupe terroriste a l’intention de « réapparaître et de retrouver une pertinence mondiale, tant virtuelle que réelle, en vue de restaurer sa capacité et de reprendre ses opérations internationales hautement complexes ». Malgré la perte de son dernier bastion en Syrie en mars dernier et celle de son dirigeant en octobre, Daech – une organisation caractérisée par sa grande capacité de résilience et d’adaptation à de nouveaux contextes – a continué à intensifier sa présence dans un pays détruit par un conflit.
Par Ana Rodriguez