Afghanistan va libérer trois prisonniers talibans
L’Afghanistan va libérer trois prisonniers talibans de haut rang, a déclaré mardi le président afghan Ashraf Ghani, suggérant que cette décision «très difficile» pourrait s’effectuer en échange de la libération de deux professeurs étrangers retenus en otage depuis 2016 par les insurgés.
Parmi les trois prisonniers talibans figure Anas Haqqani, fils du fondateur du réseau Jalaluddin Haqqani, une importante branche de la rébellion talibane et auteur de nombreuses attaques contre Kaboul et ses alliés de l’Otan. «Le 8 août 2016, deux professeurs de l’université américaine, un Australien et un Américain, qui se trouvaient ici pour enseigner à nos fils, ont été kidnappés à Kaboul», a rappelé Ashraf Ghani dans son discours.
«Nos recherches conjointes pour les retrouver n’ont donné aucun résultat. Nous avons des informations selon lesquelles leur santé s’est détériorée en détention chez les terroristes. La libération de ces deux professeurs était la condition principale pour démarrer des négociations officieuses avec les talibans», a souligné Ashraf Ghani. Et d’ajouter : «Nous avons donc décidé, en consultations rapprochées avec nos partenaires internationaux, notamment les Etats-Unis, (…) de libérer trois prisonniers talibans arrêtés en dehors du pays et qui se trouvent depuis un certain temps à la prison de Bagram.»
Le président afghan n’a pas donné plus de détails sur le sort des otages étrangers ni précisé quand ou comment ils pourraient être libérés. Une source talibane au Pakistan a indiqué que «l’otage américain (Kevin King) était gravement malade et il y avait des craintes qu’il meure au cours de sa détention par les talibans, c’est pourquoi ils voulaient le libérer». Aucun commentaire n’a pu être obtenu dans l’immédiat auprès des ambassades américaine et australienne à Kaboul.
Les deux universitaires, l’Américain Kevin King et son confrère australien Timothy Weekes avaient été capturés par des hommes armés portant des uniformes de policiers le 7 août 2016 alors qu’ils quittaient l’Université américaine de Kaboul pour regagner leur résidence. Les discussions pour la libération des deux universitaires et des prisonniers talibans «duraient depuis longtemps», a expliqué Rahimullah Yousufzai, un expert du mouvement taliban. Selon lui, cet échange «fait partie des mesures d’établissement de la confiance» entre les talibans et les Etats-Unis, et «aura un gros impact sur les discussions» entre les deux parties en vue de mettre fin au conflit. Washington a suspendu en septembre ses pourparlers avec les talibans sur un retrait des troupes américaines d’Afghanistan après un attentat, revendiqué par les insurgés, qui avait coûté la vie à un soldat américain.
Le réseau Haqqani doit sa réputation à son fondateur, Jalaluddin, mort en 2018, qui était une figure du combat des djihadistes contre l’envahisseur soviétique dans les années 1980, puis contre les Américains après leur invasion du pays en 2001. Son réseau, devenu une faction du mouvement taliban, est qualifié de terroriste par Washington. Il est accusé d’avoir commis certains des attentats les plus brutaux survenus en Afghanistan depuis l’invasion américaine. Le réseau Haqqani est aussi de longue date soupçonné d’entretenir des liens étroits avec les services secrets du Pakistan. Il a été dépeint par l’amiral américain Mike Mullen en 2011 comme le «véritable bras» des renseignements pakistanais.