Congrès annuel du parti travailliste commencece à Brighton

Profondément divisé, le Labour, principal parti d’opposition britannique a ouvert, samedi, son congrès annuel à Brighton. L’épineux dossier du Brexit, sur lequel Jeremy Corbyn refuse toujours de trancher, est au cœur des débats.

Si Jeremy Corbyn, le chef du Labour, a assuré, mercredi 18 septembre, qu’il organiserait un nouveau référendum sur le Brexit dans le cas où les travaillistes remporteraient les élections législatives, il se garde toujours bien d’afficher sa position sur le sujet.
Dans une tribune publiée mardi dans The Guardian, Jeremy Corbyn explique vouloir donner « au peuple le dernier mot », avec d’un côté, la proposition d’une « offre crédible » pour sortir de l’UE et de l’autre, un maintien. « Je m’engage à mener à bien ce que le peuple décidera, en tant que Premier ministre travailliste », s’est-il contenté d’affirmer, sans préciser son avis, au grand dam des militants du Labour qui dans la majorité, voudraient le voir refuser un divorce avec l’UE.
Jouant la carte du compromis, le leader de 70 ans préfère vanter les mérites d’un parti travailliste qui serait « le seul au Royaume-Uni à faire confiance aux citoyens britanniques pour prendre la décision ». Dans ce climat d’incertitude, le représentant de la gauche cherche à incarner une alternative crédible en cas de revirement, tout en gardant une ligne suffisamment vague pour ne pas effrayer une partie de ses électeurs pro-Brexit.

Une ambiguïté assumée qui déroute et ressemble surtout à une « fuite en avant », analyse Nicholas Dungan, chercheur à l’Atlantic Council, contacté par France 24. « L’électorat du Labour est divisé en deux catégories : d’un côté, les bien-pensants de gauche pour le ‘remain’ (‘maintien’) et de l’autre, les opprimés de la société pour le retrait. Corbyn qui veut rester le leader du parti travailliste préfère minimiser les dégâts, ne vexer personne et donc ne pas trancher », analyse le spécialiste.
Le chef du Labour s’est toujours montré plus à l’aise sur les thématiques économiques et sociales que pour défendre sa vision du Brexit. Eurosceptique notoire, il avait défendu du bout des lèvres le maintien, pendant sa campagne du référendum de juin 2016. Sous la pression de son parti, il a fait évoluer sa position officielle, soutenant tour à tour le maintien dans l’union douanière, le marché unique et enfin la tenue d’un second référendum.

Reste que cette absence de lisibilité peine à convaincre les potentiels alliés du Labour. « Être neutre sur le Brexit est une abdication honteuse de leadership », a même taclé sur Twitter la Première ministre d’Écosse, Nicola Sturgeon, cheffe du parti indépendantiste écossais SNP, deuxième force de l’opposition au Parlement britannique.

Dans ce contexte, une frange du Labour compte bien profiter du congrès travailliste pour forcer Corbyn à s’engager en faveur d’un maintien dans l’UE. Une « hypothèse toutefois peu probable », estime Nicholas Dungan. Les échanges s’annoncent houleux : les militants ont déposé plus de 80 motions qui devraient être débattues à Brighton jusqu’à mercredi. Selon Les Échos, ces 400 pages de textes appellent le parti à faire campagne pour le « remain » dans le cas d’un nouveau référendum, voire à renoncer purement au Brexit, en révoquant l’article 50 du traité de Lisbonne qui régit la sortie d’un pays de l’UE.
Une position difficilement défendable pour le chef du parti travailliste, selon Nicholas Dungan. « Il ne faut pas oublier que les parlementaires et les électeurs n’ont pas le même point de vue concernant la sortie de l’UE. Deux tiers de la population britannique pensent qu’il faut respecter les résultats du scrutin de 2016. Or révoquer l’article 50, c’est aller précisément à contre-sens du référendum », souligne le chercheur.
Une ambiguïté qui profite aux centristes
Pour l’heure, plusieurs caciques du parti travailliste, comme le syndicaliste John McDonnell ou la députée Diane Abbott, ont déjà prévenu qu’ils voteraient pour un maintien dans l’UE, dans le cas d’un nouveau scrutin. Car comme l’a rappelé le numéro deux du parti de gauche, Tom Watson, « l’ambiguïté » entretenue du Labour sur le Brexit lui a coûté des voix en mai dernier, lors des élections européennes.
Les travaillistes avaient alors obtenu 13,7 % des suffrages, soit un recul de 10 points sur cinq ans. De nombreux défenseurs d’un maintien dans l’UE leur avaient préféré les libéraux-démocrates, qui prônent une annulation du Brexit, sans second référendum.

« Je suis fier de diriger ce parti, je suis fier de la démocratie de ce parti et évidemment, je me conformerai à la décision du parti, quelle qu’elle soit », a répété, dimanche, le chef du parti travailliste, dans la station balnéaire de Brighton.

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