Coronavirus : l’Union européenne à la croisée des chemins
L’Union européenne (UE) risque d’être l’objet de nombreux débats suite au Coronavirus. Cette pandémie la met dans une situation délicate. Déjà affaiblie par le Brexit, l’Union se prend un second choc d’une ampleur bien plus grande avec une crise qui l’affecte profondément.
Les États sont redevenus les acteurs principaux de la gestion de crise, ce qui pose des questions quant au futur de l’UE et de ses institutions. Pour autant l’UE est-elle morte ? Loin de là, mais elle va devoir se transformer. La question est de savoir comment.
Une Union européenne en retrait et des États livrés à eux-mêmes
Ces dernières années, les États sont redevenus les acteurs principaux des relations internationales (certains diront que cette situation n’a jamais cessé), les organisations supranationales étant de plus en plus en retrait.
Cette crise sanitaire a renforcé cette tendance de manière conséquente. La nécessité d’agir dans l’urgence fait que la coordination internationale est difficile et trop lente à mettre en place. L’Union européenne, bien qu’organisation plus intégrée dans les États membres, n’échappe pas à ce phénomène.Plus problématique est le fait que certains de ses principes ont été atteints. La libre-circulation des personnes au sein de l’espace Schengen a été, de facto, suspendue à l’initiative des pays membres. Une politique risquant de renforcer des partisans des contrôles des frontières : ceux qui ont été en faveur de leurs fermetures dans cette crise sanitaire auront du mal à rétorquer que de telles mesures ne sont pas efficaces.
Une autre carence mise en avant par la crise, est la solidarité entre les membres de l’UE. Le cas de l’Italie est, à cet effet, parlant. Cette dernière ayant du mal à juguler la progression du virus, a eu besoin d’importer du matériel médical. L’aide est venue au final de la Chine, de la Russie et de Cuba. On peut saluer le fait que la coopération internationale fonctionne et ce quelle que soit la tendance des régimes politiques. Néanmoins, cette conjoncture met à mal l’idée d’une Europe souveraine et puissante.
Le résultat est aussi une perte de confiance envers l’UE. Comme le rappelle l’Institut Montaigne : « Selon un sondage Monitor Italia, publié le 13 mars, 88 % des Italiens estiment que l’Union européenne n’aide pas l’Italie face au coronavirus. 67 % considèrent qu’appartenir à l’UE constitue un désavantage contre 47 % en novembre 2018 ». Il est logique et salutaire que, dans une telle situation, les décisions soient prises en priorité de manière décentralisée. Néanmoins, l’absence de cohésion montre des effets pervers.
Quel futur pour l’UE ?
Il parait plus que probable que l’UE va chercher à tirer des leçons de cette crise. Toute la question est de savoir quels choix et directions vont être pris. Car, au-delà de la crise sanitaire existe désormais une crise économique. L’UE doit, avant tout, se rappeler qu’elle est la seconde zone économique au monde après les États-Unis et qu’elle s’est bâtie sur ce domaine. Dès lors, le pan économique de la politique européenne ne doit être ni sacrifié ni ignoré.
Le président de la République italien, Sergio Mattarella a déclaré le 12 mars que « de l’Union européenne on attend des aides, point des obstacles« . L’UE va devoir s’adapter et être flexible vis-à-vis des États membres.
Plus que jamais, il va être important que le principe de subsidiarité de l’UE soit mis en avant : l’Union doit offrir un soutien tout en prenant en compte la diversité de ses membres. La multiplicité des réactions face au coronavirus montre la difficulté d’avoir une unité décisionnelle au niveau européen.
De fait, même dans les États fédéraux comme l’Allemagne et les États-Unis, une part non négligeable de la gestion de crise s’est faite à travers les États fédérés. Enfin, le Royaume-Uni, bien que n’étant plus membre de l’UE, devra rester un partenaire privilégié, du fait de sa force politique et économique et de son interconnexion avec le reste du continent. La souplesse sera la clé pour une meilleure efficacité politique et pour la survie de l’UE.
Par Alexandre Massaux