Crise humanitaire aux Bahamas après Dorian
Entre évacuations, recherches de victimes et risques sanitaires, les Bahamas font face à une crise humanitaire qui s’annonce longue, une semaine après le passage dévastateur de l’ouragan Dorian, qui a encore causé des dégâts très loin de là, au Canada.
Le ministre de la Santé Duane Sands, cité par la presse locale, a indiqué dimanche soir que l’ouragan avait fait au moins 44 morts. Mais les dirigeants de l’archipel ont averti que le bilan allait irrémédiablement grimper.
Les rescapés interrogés ces derniers jours sur l’île d’Abaco, contre laquelle Dorian s’est acharné pendant de longues heures les 1er et 2 septembre, avec des vents à plus de 250 km/h, laissaient craindre le pire.
« Il y a des morts partout »; « des corps traînent encore », témoignaient-ils en tentant par tous les moyens, bateaux ou avions, de quitter leur île privée d’eau et d’électricité, où les déchets s’amoncelaient au milieu des débris sous une chaleur intense.
Natasha Young, blessée lors du passage de l’ouragan, a été évacuée dès lundi vers Nassau. Sortie de l’hôpital, elle attend depuis sur les quais du port de la capitale bahaméenne l’arrivée de ses proches, dont elle est sans nouvelles.
« J’ai retrouvé hier ma mère et ma tante. Nous attendons tous désormais mon frère, mes neveux et nièces et mes enfants », a confié dimanche à l’AFP la jeune femme de 24 ans. « Je n’irai pas dans un refuge tant que la famille ne sera pas réunie. »
Face aux risques sanitaires, le ministère de la Santé bahaméen et l’Organisation panaméricaine de la santé ont tenu à rassurer: aucune épidémie ne frappe actuellement les Bahamas.
« Aucune île des Bahamas n’a été placée en quarantaine », précisent-ils dans un communiqué commun. « Les inondations peuvent potentiellement accroître la transmission de maladies contagieuses liées à l’eau. Néanmoins, aucun cas de choléra n’a été détecté pour le moment, et le nombre de maladies infectieuses n’a pas non plus augmenté. »
Dorian a laissé au moins 70.000 personnes sans abri dans les îles les plus sévèrement touchées, Abaco et Grand Bahama, selon l’ONU, dont le Programme alimentaire mondial a acheminé sur place près de 15.000 repas et des tonnes d’équipement.
La dévastation va durer « des générations », avait prévenu dès jeudi le Premier ministre des Bahamas Hubert Minnis alors que l’archipel touristique s’apprêtait à affronter une longue crise humanitaire.
Il a souligné que Nassau ne pouvait « pas accueillir tous les sinistrés », qui pourraient y être hébergés temporairement sous des tentes.
Des Haïtiens, nombreux à vivre dans un bidonville complètement rasé par l’ouragan sur l’île d’Abaco, ont accusé le gouvernement bahaméen d’avoir donné la priorité à ses ressortissants pour les évacuations.
A des milliers de kilomètres plus au nord, Dorian, après avoir relativement épargné les côtes américaines, a poursuivi sa route au-dessus du Canada, drainant dans son sillage de fortes bourrasques (jusqu’à 140 km/h), des pluies torrentielles et des vagues de près de vingt mètres.
Requalifié en « cyclone post-tropical très intense » par le Centre canadien de prévision des ouragans (CCPO), il a touché terre samedi soir dans la province de la Nouvelle-Ecosse.
Des arbres ont été déracinés, des lignes électriques sont tombées et une grue s’est effondrée sur un immeuble en construction à Halifax, mais aucun blessé grave n’a été signalé.
Désertées pendant le passage de Dorian, les rues de la ville portuaire de 400.000 habitants, qui abrite la flotte canadienne atlantique, ont repris vie dimanche au son des tronçonneuses.
Les autorités canadiennes ont indiqué avoir été mieux préparées que pour l’ouragan Juan, qui avait causé des dégâts considérables dans la région en 2003.
Plus de 500.000 personnes ont été privées d’électricité à travers les provinces Maritimes du Canada (Nouvelle-Ecosse, Ile du Prince Edouard et Nouveau Brunswick), selon le CCPO. Quelque 700 soldats aidaient dimanche aux opérations de déblayage.
Dimanche à 22H00 GMT, Dorian se déplaçait au-dessus du détroit de Belle Isle, qui sépare l’île de Terre-Neuve du Labrador, accompagné de vents de jusqu’à 110 km/h, selon le dernier bulletin du CCPO.
La dépression devait continuer de faiblir et s’éloigner au-dessus de l’Atlantique, en direction de l’Europe, dans le courant de la nuit de dimanche à lundi.