Turquie: Dix amiraux à la retraite arrêtés pour coup d’État politique

Dix amiraux à la retraite ont été placés en garde à vue lundi, après avoir critiqué le projet du canal d’Istanbul, porté par le président Recep Tayyip Erdogan, qui évoque de son côté un coup d’État politique.

Dix anciens amiraux ont été arrêtés, lundi 5 avril, pour avoir critiqué avec d’autres anciens officiers le projet d’un nouveau canal à Istanbul cher au président turc Recep Tayyip Erdogan, dans un pays où la moindre incursion des militaires en politique réveille le spectre de coups d’État passés.

Quatre autres anciens officiers ont aussi été visés par des mandats d’arrêt mais n’ont pas été interpellés en raison de leur âge. Ils ont reçu l’ordre de se présenter à la police d’Ankara dans les trois prochains jours pour déposer.

« Le devoir d’amiraux retraités n’est pas de publier des déclarations qui comportent des allusions à un coup d’État politique. Aucun fonctionnaire à la retraite n’a le droit d’emprunter un tel chemin », a déclaré Recep Tayyip Erdogan lors d’un discours à Ankara.

Une enquête a été ouverte contre les militaires à la retraite pour « réunion visant à commettre un crime contre la sécurité de l’État et l’ordre constitutionnel », selon le bureau du procureur.

Selon le bureau du procureur général d’Ankara, les dix amiraux retraités ont été placés en garde à vue. Ils font partie des 104 signataires d’une lettre ouverte alertant contre la menace que pourrait représenter, selon eux, le projet de « Canal Istanbul », porté par le président Recep Tayyip Erdogan, pour un traité qui garantit le libre passage par le détroit du Bosphore.

De hauts responsables turcs ont condamné la lettre ouverte signée par les amiraux retraités, estimant que son ton s’apparentait à celui d’un « coup d’État ».

« Il y a une différence entre exprimer ses idées et faire une déclaration sur un ton de coup d’État », a dénoncé dimanche le président du Parlement, Mustafa Sentop.

« Nous allons lutter contre cette mentalité obscure. Il n’existe aucun pouvoir au-dessus de celui de la volonté de la nation », a réagi lundi le ministre de la Justice, Abdulhamit Gül.

Le gouvernement argue que ce canal permettrait de doter Istanbul d’un nouveau pôle d’attractivité en plus de soulager le Bosphore, l’un des détroits les plus congestionnés du monde.

Mais les opposants affirment qu’outre son impact sur l’environnement, le projet pourrait compromettre la convention de Montreux, datant de 1936, qui garantit le libre passage des navires civils dans les détroits du Bosphore et des Dardanelles, aussi bien en temps de paix que de guerre.

L’intervention des militaires dans la politique reste un sujet sensible en Turquie où l’armée, se définissant comme le garant de la laïcité, a mené trois coups d’État entre 1960 et 1980 et a longtemps eu une influence déterminante sur les gouvernements.

par: Arab Observer

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