Jeux africains: le tennis de table, sport émergent sur le continent
Sport majeur sur le continent asiatique, le tennis de table peine à trouver se place au niveau mondial pour le continent africain. Seuls les athlètes du Nigeria et de l’Égypte arrivent tant que bien que mal à tirer leur épingle du jeu. Chaque année, la Fédération internationale de tennis de table finance des programmes de développement en Afrique.
Dans une des salles du complexe omnisports du FUS de Rabat, les gestes sont répétés à l’infini. Les rencontres s’enchaînent, les balles fusent, et le bruit des chaussures qui glissent sur le sol fait oublier pour un temps que la discipline est dominée par l’Asie. Si le tennis de table a aussi sa place aux Jeux africains, le continent a du mal à être représenté au plus haut niveau.
« En Afrique, il y a un potentiel énorme, assure pourtant Mounir Bessah, membre de la Fédération internationale de tennis de table, venu superviser le bon déroulement du tournoi. Lors des derniers Championnats du monde de moins de 12 ans à Oman, c’est une Égyptienne et un Nigérian qui se sont imposés. » Au niveau seniors, c’est autre chose.
À Rio en 2016, seul le Nigérian Quadri Aruna avait atteint les quarts de finale en simple, et avait été battu par Ma Long, le futur vainqueur de l’épreuve. Il était devenu le premier pongiste africain à atteindre ce niveau de compétition aux Jeux olympiques. Quadri Aruna, actuellement 22e au classement mondial, a été élu athlète de l’année deux années de suite au Nigeria. « Le tennis de table est très développé au Nigeria avec 500.000 pratiquants et aussi en Égypte », précise Mounir Bessah.
En 2018, l’ITTF a dépensé environ 700.000 euros dans un plan de développement destiné au continent africain. « Pour 2019, nous avons financé 48 projets. On est en train de faire évoluer notre sport en installant des responsables de région financés par nos moyens pour professionnaliser notre sport », explique Mounir Bessah. Il ajoute : « En Afrique centrale, en Afrique du Sud ou encore au Botswana, on peut faire évoluer la discipline. Quant à l’Afrique subsaharienne, il faut l’aider à mettre en place des fédérations efficaces comme en Afrique du Nord ».
Pour éviter que le tennis de table ne devienne une discipline uniquement asiatique, les dirigeants ITTF avaient frappé un grand coup en 2008. Désormais, un ou une pongiste de plus de 21 ans ne pourra plus changer de nationalité après avoir déjà joué pour la sélection nationale de son pays d’origine.
Et pour protéger les jeunes talents de moins 21 ans, l’ITTF a mis en place des délais de carence importants pour réduire le nombre de changements de nationalité.
Aux épreuves du tennis de table des Jeux olympiques de Pékin en 2008, la Chine avait remporté toutes les médailles d’or, d’argent et de bronze, aussi bien dans les tournois individuels qu’en équipes, chez les hommes comme chez les femmes. Même chose en 2012 à Londres.
« En Chine, dès l’âge de 4 ou 5 ans, les enfants s’entraînent déjà plusieurs heures par jour », note la Franco-Camerounaise Sarah Hanffou à propos de ce sport « complet » où le mental joue beaucoup.
Celle qui a été en équipe de France jusqu’à l’âge de 21 ans sait que le fossé est énorme entre la majorité des pays africains et le reste du monde. « Ce qui nous paraît évident en France ne l’est pas du tout au Cameroun. Ne serait-ce qu’avoir une salle spécifique, des tables et des raquettes pour jouer », argumente Sarah Hanffou.
Selon elle, si la Fédération internationale fait beaucoup, elle ne peut pas aller contre les choix politiques faits par les États. « On a du bois en Afrique et on pourrait construire des tables artisanales très facilement. Mais il faut de la volonté. La plupart des Nigérians apprennent sur des tables en béton dans la rue », pointe Sarah Hanffou.
« Sans une aide extérieure, c’est compliqué »
De son côté, cette avocate de formation a créé une association pour collecter du matériel et l’envoyer sur le continent. Depuis une quinzaine d’années, Sarah Hanffou tente de développer le tennis de table en Afrique avec des formations et des stages d’initiation vers tous les publics.
Autre exemple : c’est avec l’aide de son oncle qui vit en France que le jeune togolais Désire Akakpo, numéro un au niveau des juniors dans son pays, continue de pratiquer sa passion. « C’est lui qui m’a poussé à jouer au tennis de table. Je l’ai vu jouer et cela m’a plu. Et c’est grâce à lui que j’ai du matériel. Sans une aide extérieure, c’est compliqué », conclut le jeune garçon de Lomé.
A côté, une Nigériane termine son échauffement en sautant à l’élastique avant d’entrer en piste. Un jeune sud-africain écoute de la musique pour tuer le temps qui le sépare de sa compétition. La journée des pongistes africains bat son plein.