Tunisie: Kaïs Saïed dissout le Conseil de la magistrature

Le président tunisien Kaïs Saïed, qui s’est arrogé fin juillet les pleins pouvoirs, a décidé de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature, organisme indépendant chargé de nommer les juges, en l’accusant d’être partial et au service de certains intérêts.

Kaïs Saïed a déclaré, dans une vidéo diffusée dans la nuit où on le voit discuter avec des ministres, que le Conseil appartenait au passé et qu’il publierait un décret temporaire à son sujet. Aucun détail supplémentaire concernant ce décret n’a été donné.

Kais Saied accuse cet organe constitutionnel indépendant de corruption et d’avoir ralenti des procédures dont les enquêtes sur les assassinats de militants de gauche survenus en 2013.

Dans ce conseil, les postes et les nominations se vendent et se font selon les appartenances , a affirmé le chef d’État, en ajoutant : Vous ne pouvez pas imaginer l’argent que certains juges ont pu recevoir, des milliards et des milliards.

Selon les observateurs, il vise ainsi le parti Ennahdha qui a contrôlé le parlement et les différents gouvernements depuis la révolution de 2011 et la chute du dictateur Zine El Abidine Ben Ali.

Le «mouvement du 25 juillet», qui regroupe ses partisans, avait appelé samedi M. Saïed à dissoudre le CSM pour «purger» le pouvoir judiciaire de «magistrats corrompus». Le président a assuré «travailler sur un décret provisoire» pour réorganiser le CSM. Il y a quelques semaines, il avait déjà retiré un certain nombre d’avantages aux membres du CSM.

«Malheureusement dans ce pays, certains juges dans les tribunaux ont manipulé le dossier Chokri Belaid», a dénoncé M. Saïed, à propos d’un dirigeant de gauche tué de trois balles devant son domicile le 6 février 2013. Une importante manifestation est prévue dimanche à Tunis pour commémorer l’assassinat de ce militant et celui de Mohamed Brahmi, tué dans des circonstances similaires le 25 juillet 2013.

«Ce n’est pas le premier procès où ils essaient de cacher la vérité depuis des années», a ajouté M. Saïed. «Dans ce conseil, les postes et les nominations se vendent et se font selon les appartenances», a affirmé le chef d’État, en ajoutant: vous ne pouvez pas imaginer l’argent que certains juges ont pu recevoir, des milliards et des milliards. Pour lui, la place des juges (du CSM) n’est pas là où ils se trouvent mais sur le banc des accusés.

M. Saïed concentre tous les pouvoirs depuis le 25 juillet, quand il a limogé son Premier ministre et gelé le parlement, une décision qualifiée de coup d’État par Ennahdha et d’autres opposants. Il a depuis nommé un gouvernement mais prend ses décisions par décrets. Mi-décembre, il a annoncé un référendum cet été pour réformer la Constitution et des élections législatives en décembre.

Des partis politiques et des organisations, dont l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), manifesteront dimanche pour réclamer que les personnes impliquées dans des affaires de terrorisme soient tenues pour responsables de leurs actes et rendre hommage au militant au laïque Chokri Belaïd au neuvième anniversaire de son assassinat.

« Je dis aux Tunisiens qu’ils peuvent manifester librement. C’est leur droit. Tout comme nous avons le droit de dissoudre le Conseil supérieur de la magistrature », a déclaré le président tunisien.

par: Arab Observer

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