La Fraternité en Israël soutient la coalition Bennett-Lapid
L’adhésion de la Liste arabe unie de la Fraternité dirigée par Mansour Abbas à une coalition gouvernementale en Israël a suscité la polémique dans les milieux politiques palestiniens, entre un opposant qui y voit une concession dans la logique des accords, et un partisan qui la considère comme un pas » vers la résolution des problèmes des Palestiniens à l’intérieur.
Une position controversée dans laquelle Mansour Abbas, un descendant de la Fraternité, est apparu souriant aux côtés de Naftali Bennett, le leader juif qui défend les colonies, quelques instants après avoir accepté l’accession de ce dernier au poste de Premier ministre et lui avoir accordé la majorité au Parlement.
L’accord historique conclu mercredi entre Naftali Bennett, Yaïr Lapid et Mansour Abbas marque une étape symbolique du point de vue des institutions publiques, mais aussi de la communauté palestinienne en Israël.
Surnommé le « faiseur de roi » par les médias internationaux. Mansour Abbas a été longuement courtisé aussi bien par Benyamin Netanyahu que par Yair Lapid. Il est le patron de la Liste arabe unie, une petite formation issue de la confrérie internationale des Frères musulmans. Raam a remporté quatre sièges sur 120 lors des législatives israéliennes de mars dernier, quatre sièges précieux pour obtenir une coalition majoritaire.
Mais Mansour Abbas refuse ce titre de faiseur de roi et a tenu ses derniers mois à afficher son humilité. Il ne se revendique ni de gauche ni de droite, mais dit surtout vouloir imposer sa formation comme un partenaire dans le jeu des grands partis israéliens. Pour se faire, il a dû rompre avec les autres partis arabes, communistes, nationalistes et libéraux. Plus que les coups d’éclats, il cherche les compromis, mais affirme tout de même vouloir défendre les droits des familles palestiniennes et améliorer leurs conditions de vies bien plus dures que celles de leurs voisins juifs.
Tandis que le duo Lapid-Bennett tentait de finaliser un accord avec Mansour Abbas, Benjamin Netanyahu aurait appelé plusieurs fois ce dernier afin de l’en dissuader. L’image d’un Mansour Abbas courtisé de tous, véritable « faiseur de roi », n’a jamais été aussi près de la réalité. D’autant que M. Abbas a conditionné le soutien de son parti à des demandes très spécifiques portant sur les préoccupations quotidiennes de la communauté arabe d’Israël.
De loin, il peut sembler que le soutien d’un parti palestinien à une coalition gouvernementale approfondisse l’intégration des Arabes à l’ensemble des instances de l’État. Le pragmatisme, érigé en véritable doctrine par la LAU, qui appelle à une stratégie de changement de l’intérieur, serait un pari gagnant pour les Arabes israéliens, peut-être le seul à même de leur ramener de nouveaux financements, comme ces 2,5 millions de shekels promis pour la lutte contre le crime organisé, ou ces 20 millions de shekels qui devraient être investis au cours de la prochaine décennie dans la réparation des ruines des villes et villages arabes…
Mais si ce raisonnement était parfaitement valable il y a encore un mois, il l’est beaucoup moins au lendemain d’un cycle de violences au cours duquel la marginalisation des Palestiniens d’Israël, longtemps camouflée derrière une vitrine de « coexistence pacifique », est réapparue au grand jour. Durant le mois de mai, les villes arabes israéliennes se sont soulevées de concert et en signe de solidarité avec Gaza, Jérusalem, Ramallah ou Hébron. Elles se sont aussi heurtées à la violence du système répressif israélien et au racisme d’une partie de la population juive qui ne cache plus son rejet de cette cohabitation…
À l’heure où le mouvement de solidarité interpalestinien s’est recentré autour de l’unité nationale, Mansour Abbas et son mouvement font donc un pari risqué qui pourrait rapidement avoir un arrière-goût amer. Car même s’ils ne prendront pas directement part au gouvernement, ils accordent leur voix à un futur exécutif qui donne la part belle aux ministres de droite et d’extrême droite, susceptibles de poursuivre une politique de statu quo… à commencer par la colonisation persistante de la Cisjordanie et le siège de Gaza.
par: Arab Observer