L’arrestation de Pavel Durov, le fondateur de Telegram provoque une vague de panique sur Internet
Pavel Durov, le fondateur de l’application de messagerie Telegram, a été arrêté ce samedi soir à l’aéroport du Bourget, en banlieue parisienne, à la sortie de son jet privé. Sa détention a été prolongée ce dimanche. Il est considéré responsable de toutes les activités illégales qui se tiennent sur sa plateforme. Et son arrestation a déclenché un véritable vent de panique en ligne.
Assez de l’impunité de Telegram, a lâché un enquêteur français peu après l’arrestation, relève The Guardian. Le milliardaire peut voir sa garde à vue prolongée jusqu’à 96 heures.
Pavel Durov, à 39 ans, est assis sur une fortune estimée à 15 milliards de dollars. Il a cofondé en 2013 Telegram, une application de messagerie qui revendique un milliard d’utilisateurs. Celle-ci propose des messages chiffrés de bout en bout et permet aux utilisateurs de créer des canaux pour diffuser des informations à leurs abonnés. Un système qui se veut très sécurisé, et qui a grandi jusqu’à devenir un véritable nouveau réseau social, sans aucune centralisation ni aucun contrôle.
Cela a déjà valu des ennuis à Durov dans son pays natal. Il avait refusé de fermer les groupes d’opposition qui s’étaient formés sur VK, un précédent réseau social qu’il avait fondé à l’âge de 22 ans. Suite à ça, il a quitté la Russie pour vivre à Dubaï, et a acquis les citoyennetés française et émiratie.
Mais en France, il était sous le coup d’un mandat d’arrêt dans le cadre d’une enquête sur des accusations de fraude, de trafic de drogue, de crime organisé, de promotion du terrorisme et de cyberharcèlement. Il est accusé de n’avoir jamais rien mis en place pour réguler Telegram, qui sert d’espace de communication et d’endoctrinement à des extrémistes de tout bord. Des transactions illégales, dont des trafics de drogues et de contenu pédopornographique, ont également lieu sur son réseau.
L’ambassade de Russie à Paris a demandé un accès à Durov et a déclaré que la France avait jusqu’à présent évité toute coopération sur la situation. Si celui-ci se définit comme un opposant à Poutine, son réseau reste très populaire. Sa supposée sécurisation poussée des échanges attire tous les extrémistes, tant les opposants au régime que les partisans d’une guerre à outrance. Telegram est devenu un outil essentiel pour communiquer loin des oreilles indiscrètes, en Russie. Y compris pour l’armée: depuis le début de l’opération militaire russe spéciale, c’est via Telegram que les troupes communiquent, et ce, jusque sur le champ de bataille.
C’est aussi vrai pour les autorités civiles: c’est via Telegram que le gouverneur par intérim de l’oblast de Koursk, Alekseï Smirnov, a communiqué sur l’avancée ukrainienne et sur les ordres d’évacuation adressés à la population. Telegram est devenu un vecteur de communication incontournable, en Russie, même s’il sert aussi à critiquer le gouvernement – c’est sur ce réseau que Evgueni Prigojine a annoncé sa tentative de coup d’État l’année dernière. Mais les officiels ne peuvent s’en passer.
C’est d’ailleurs aussi vrai du côté ukrainien, où le président Volodymyr Zelensky et ses ministres communiquent largement par Telegram. Cela a conduit à une véritable guerre culturelle sur le réseau, où les deux camps communiquent sur l’évolution des combats, et où il est parfois difficile de faire la différence entre véritables informations et propagande.
Du côté russe, on craint que l’arrestation de Pavel Durov ne permette aux Occidentaux de percer les secrets de Telegram. Les médias s’inquiète de voir l’OTAN s’emparer de Telegram. Difficile toutefois de savoir si c’est là une réelle possibilité, mais c’est en tout cas ce que la Russie et ses nombreux relais présentent comme réelle raison pour arrêter Durov. Sans mentionner ni les réseaux d’endoctrinement terroriste, ni les échanges pédopornographiques.