Le Parlement britannique se réunit pour se prononcer sur l’accord de Brexit
Après avoir difficilement arraché un nouvel accord sur le Brexit, Boris Johnson se prépare à relever un défi encore plus délicat, samedi, au Parlement britannique, où il tentera de le faire valider par une majorité d’élus.
L’issue du vote est très incertaine : le Parlement britannique se réunit, samedi 19 octobre, pour se prononcer sur l’accord de Brexit conclu entre Londres et Bruxelles, à 12 jours seulement de la date prévue de sortie de l’Union européenne.
Arraché in extremis à l’issue de négociations laborieuses, l’accord est censé régler les conditions du divorce après 46 ans de vie commune, permettant une sortie en douceur assortie d’une période de transition courant au moins jusqu’à fin 2020.
Mais son succès est suspendu à l’approbation du Parlement britannique, qui a déjà fait preuve d’intransigeance par le passé. Les députés ont rejeté par trois fois le précédent accord de sortie conclu entre l’ex-Première ministre Theresa May et les 27 autres membres de l’Union européenne.
Convoquée pour la première fois un samedi depuis la guerre des Malouines il y a 37 ans, la Chambre des Communes ouvrira à 8 h 30 GMT (9 h 30 heure locale). Boris Johnson fera une déclaration aux députés. Ce sera ensuite le temps du débat puis du vote. Le débat était prévu à l’origine sur 90 minutes ; il n’est plus limité dans le temps et pourrait durer toute la journée.
Boris Johnson a déployé tous ses efforts ces derniers jours pour convaincre les députés de soutenir son accord, enchaînant coups de téléphones et interventions à la télévision.
Arguant qu’il n’y avait « pas de meilleure issue » que son accord pour quitter l’UE le 31 octobre, le Premier ministre a invité les élus à imaginer un monde où l’obstacle du Brexit, qui paralyse la vie politique britannique depuis trois ans, aura « été dépassé ». « Je pense que la nation poussera un grand soupir de soulagement », a-t-il ajouté.
Si l’accord est approuvé, il devra encore être validé par le Parlement européen. En cas de rejet, Boris Johnson a toujours dit qu’il préférait une sortie sans accord à un nouveau délai, le Brexit ayant déjà été repoussé deux fois. Mais une loi votée par le Parlement l’oblige à demander un report de trois mois à l’UE.
La perspective d’un Brexit sans accord est redoutée des milieux économiques, car il pourrait entraîner selon les prévisions du gouvernement lui-même des pénuries de denrées alimentaires, d’essence ou encore de médicaments.
Le gouvernement, sans majorité avec 288 élus, a besoin de 320 voix pour valider son accord. Mais les partis d’opposition ont déjà annoncé qu’ils s’y opposaient : le parti centriste libéral-démocrate (19 voix) et les nationalistes écossais SNP (35 voix) sont anti-Brexit, le parti travailliste (242 voix) estime que le nouvel accord fragilise les droits des travailleurs, les Verts (1 voix) qu’il ne respecte pas l’environnement…
Surtout, ça coince auprès des unionistes nord-irlandais du DUP (10 voix), pourtant alliés de Boris Johnson à Westminster, pour qui le texte octroie un statut différent à l’Irlande du Nord et isole la province britannique du reste du pays.
Le gouvernement espère convaincre un groupe de « rebelles » travaillistes, dont certains avaient voté en faveur de l’accord négocié par Theresa May, ainsi que des indépendants, notamment les députés exclus du parti conservateur parce qu’ils s’opposaient à un « no deal ».
Si le Parlement est divisé, la société britannique l’est aussi, près de trois ans après le référendum de 2016 qui a décidé à 52 % du départ du Royaume-Uni du bloc européen. Alors que les débats battront leur plein pour régler les conditions du divorce, une manifestation anti-Brexit est prévue devant Westminster pour pousser à la tenue d’un second référendum.
La décision des députés sera aussi scrutée outre-Manche. Plusieurs dirigeants européens les ont enjoints de l’approuver, pour pouvoir passer à la phase suivante des négociations, celle qui déterminera la future relation entre l’UE et le Royaume-Uni.
Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a averti qu’un rejet du texte engendrerait une « situation très compliquée », tandis que le président français Emmanuel Macron s’est prononcé contre de « nouveaux délais ».
L’accord de Boris Johnson est censé résoudre la quadrature du cercle de la frontière irlandaise, sur laquelle avait buté le processus jusqu’à présent. L’objectif est d’éviter le retour d’une frontière physique entre l’Irlande du Nord britannique et la république d’Irlande, membre de l’UE, pour préserver la paix sur l’île.
Pour cela, il maintient sur le papier l’Irlande du Nord dans le territoire douanier britannique mais prévoit un régime spécial pour les marchandises arrivant dans la province britannique, selon que celles-ci sont destinées à y rester ou à passer dans le marché unique européen.