Le président tunisien Kais Saied limoge le Premier ministre Kamel Madouri

Le président tunisien Kais Saied a décidé de limoger dans la nuit de jeudi à vendredi le Premier ministre Kamel Madouri, un technocrate nommé en août dernier lors d’un vaste remaniement, selon un communiqué de la présidence.
M. Madouri a été immédiatement remplacé par Sarra Zaafrani Zenzri, ministre de l’Equipement, tandis que le reste du gouvernement a été maintenu, selon l’annonce officielle.
Le président s’était montré insatisfait ces dernières semaines de l’action de son gouvernement, alors que la Tunisie traverse de graves difficultés économiques et financières, avec une croissance poussive de 0,4 % en 2024, un taux de chômage de 16 % et une dette équivalent à environ 80 % de son Produit intérieur brut (PIB).
Nommé en août dernier à l’occasion d’un vaste remaniement décidé par le président tunisien Kais Saied, le Premier ministre Kamel Madouri a été limogé dans la nuit de jeudi à vendredi, et remplacé par Sarra Zaafrani Zenzri, une haute fonctionnaire ingénieure en génie civil à la tête du ministère de l’Équipement depuis 2021. Le reste du gouvernement a été maintenu, selon un communiqué de la présidence.
Mme Zaafrani, 62 ans, qui parle arabe, français, anglais et allemand, est la deuxième femme à diriger le gouvernement en Tunisie après Najla Bouden, qui avait été Première ministre d’octobre 2021 à août 2023. Mme Bouden avait été limogée dans une période de pénuries en particulier de pain dans les boulangeries subventionnées, et remplacée par un ancien cadre de la Banque centrale, Ahmed Hachani, lui-même substitué l’été dernier.
Jusqu’à sa nomination comme ministre de l’Équipement en 2021, Mme Zaafrani, titulaire également d’un master en géotechnique décroché en Allemagne, a dirigé, à partir de 2009 au sein du même ministère, la division chargée de la construction des autoroutes, où elle négociait notamment avec les bailleurs de fonds.
Le 6 février, le président Saied avait limogé, également en pleine nuit, sa ministre des Finances Sihem Boughdiri Nemsia, remplacée par la magistrate Michket Slama Khaldi.
Dans une vidéo précédant l’annonce du changement de Premier ministre, il a estimé qu’il était temps que tout dirigeant soit entièrement tenu pour responsable de ses actes, quel que soit son poste. Finis les abus envers les citoyens, a-t-il ajouté, selon la vidéo où on le voit diriger une réunion du Conseil de sécurité nationale, avec plusieurs ministres et responsables sécuritaires.
Le président dispose de pleins pouvoirs lui permettant de révoquer ministres, patrons d’entreprises publiques (une centaine en Tunisie dans les secteurs clé de l’économie) et magistrats.
En août 2024, il avait procédé à un vaste remaniement lors duquel il avait nommé M. Madouri, un ancien haut fonctionnaire spécialiste des affaires sociales. Il avait aussi changé 19 ministres, justifiant sa décision par l’intérêt suprême de l’État et des impératifs de sûreté nationale.
Le limogeage du Premier ministre intervient dans un climat politique tendu avec des dizaines d’opposants emprisonnés, certains depuis deux ans, ainsi que des hommes d’affaires et des personnalités des médias. À l’été 2021, Kais Saied avait limogé son Premier ministre et gelé le Parlement. Il a depuis révisé la Constitution pour réinstaurer un régime ultra-présidentiel où il dispose de facto de tous les pouvoirs.