L’ONU discute de la responsabilité pénale de la Turquie pour les crimes de guerre contre les Kurdes

Des enquêteurs de l’ONU ont accusé lundi Ankara d’être responsable dans des crimes de guerre visant des Kurdes dans le nord du pays.
Ces accusations, bien qu’intervenant dans un contexte de fortes tensions entre la Turquie et les forces syriennes soutenues par la Russie après l’escalade des hostilités dans le dernier bastion rebelle d’Idleb, ne sont toutefois pas directement liées aux récents affrontements.

Dans un rapport publié lundi, qui couvre la période allant de juillet 2019 au 10 janvier, la Commission d’enquête internationale sur la Syrie (COI) affirme que la Turquie pourrait être pénalement tenue pour responsable de graves violations commises par ses alliés de l’Armée nationale syrienne (des rebelles pro-turcs), dont l’exécution d’une responsable politique kurde.
Les troupes turques et leurs alliés en Syrie ont envahi une partie du nord de la Syrie, après avoir lancé en octobre une campagne militaire contre les forces kurdes qui a provoqué la fuite de dizaines de milliers de personnes.

Dans son rapport, la COI, créée en 2011 par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, fait état des rapports de familles kurdes déplacées et d’autres civils qui ont accusé les rebelles syriens soutenus par Ankara d’avoir commis des exécutions et des pillages, et d’avoir confisqué des propriétés. La COI pointe en particulier l’exécution sommaire le 12 octobre d’une responsable politique kurde, Hevrin Khalaf, et de son chauffeur, par des rebelles pro-Turcs. La secrétaire générale du parti Avenir de la Syrie, membre de la direction du Conseil démocratique syrien, avait 35 ans quand elle a été arrêtée sur une autoroute venant de Qamishli par des membres de la Brigade 123 de l’Armée nationale syrienne. Ces derniers l’ont sortie de la voiture en la traînant par les cheveux et ont mutilé son corps avant de l’exécuter, selon la COI.

Les enquêteurs de l’ONU évoquent ainsi des « meurtres » ainsi que des « pillages » commis par les combattants de l’Armée nationale syrienne. « S’il s’avérait que des membres de groupes armés agissaient sous le commandement et le contrôle effectifs des forces turques, ces violations pourraient entraîner la responsabilité pénale de ces commandants qui étaient au courant ou auraient dû être au courant pour ces crimes, ou n’ont pas pris toutes les mesures nécessaires pour les empêcher », souligne le rapport.

Les enquêteurs de l’ONU pointent également une frappe aérienne, le 12 octobre, sur un convoi civil de 80 véhicules, incluant des familles avec enfants et des journalistes. Onze personnes ont été tuées et 74 blessées. Ils dénoncent le ciblage d' »objets nécessaires à la survie de la population civile », avec des frappes près de la station d’eau d’Aluk qui ont interrompu l’approvisionnement en eau de 460.000 personnes.
La COI a accusé à plusieurs reprises les différentes parties d’avoir commis des crimes de guerre et dans certains cas de crimes contre l’humanité.
Déclenchée en mars 2011, la révolte contre le pouvoir en Syrie s’est muée en une guerre dévastatrice. Plus de 380.000 personnes ont péri depuis le début de la guerre, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

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