Sept millions d’électeurs tunisiens appelés aux urnes

Sept millions d’électeurs ont commencé à voter, dimanche, pour choisir leur président parmi une myriade de candidats, après une campagne intense sans clivage politique clair.
Au petit matin, avant même le début du scrutin à 08H00 locales (07H00 GMT), des dizaines de personnes patientaient devant les bureaux de vote, pour ce premier tour de la présidentielle, ont constaté les journistes.

Leur choix doit se faire parmi les 26 candidats en lice, en prenant en compte que deux se sont désistés vendredi, au dernier jour de la campagne.

au bilan contesté –Youssef Chahed–, un magnat des médias poursuivi pour blanchiment d’argent et incarcéré –Nabil Karoui–, ou encore le premier candidat du parti d’inspiration islamiste Ennahdha, Abdelfattah Mourou.
A quelques heures du silence électoral imposé samedi, deux candidats de second plan ont annoncé leur désistement en faveur du ministre de la Défense Abdelkarim Zbidi. Ce technocrate a été précipité sur le devant de la scène par le président Béji Caïd Essebsi, peu avant la mort de ce dernier en juillet, sans toutefois parvenir à rassembler.

Après un clivage pour ou contre la révolution lors de la première élection libre en 2011, puis pour ou contre les islamistes lors de la présidentielle de 2014, certains candidats ont tenté de se présenter comme « antisystème ». Une façon de se distinguer d’une élite politique discréditée par des luttes de pouvoir qui ont favorisé l’émergence de figures indépendantes comme l’universitaire conservateur Kaïs Saïed.
Les Tunisiens sont avant tout préoccupés par la crise sociale dans un pays sous perfusion du Fonds monétaire international (FMI), où le chômage ronge les rêves de nombreux jeunes et l’inflation pèse sur des revenus déjà faibles.
M. Chahed est handicapé par le bilan controversé de ses trois années au pouvoir, marquées par une nette amélioration de la sécurité mais une dégradation du pouvoir d’achat des Tunisiens.
Face à lui, Nabil Karoui a gagné en popularité ces dernières années en organisant des distributions de nourriture et d’électroménager médiatisées par la chaîne de télévision qu’il a fondée, Nessma.

Ses détracteurs voient en lui un homme sans scrupules s’inspirant de l’ancien Premier ministre italien Silvio Berlusconi. Ses partisans soulignent qu’il a sillonné la Tunisie défavorisée comme aucun dirigeant politique avant lui.

Sous le coup d’une enquête pour blanchiment et évasion fiscale depuis 2017, il a été arrêté dix jours avant le début de la campagne électorale. Il a annoncé dans un courrier jeudi qu’il entamait une « grève de la faim » pour protester contre la « persécution » dont il s’estime victime. Son parti avait directement accusé Youssef Chahed d’être derrière son arrestation.
Les différents camps sont à couteaux tirés, ce qui accentue les risques de déraillement du processus électoral, a averti Michael Ayari, analyste au centre de réflexion International Crisis Group (ICG).
Ce scrutin est un « test » pour la jeune démocratie tunisienne car il « pourrait nécessiter d’accepter la victoire d’un candidat clivant », a souligné la chercheuse Isabelle Werenfels.

La Tunisie ne sera pas sauvée ni ne va sombrer », tempère l’éditorialiste Zied Krichen. « Les Tunisiens ont expérimenté l’islamisme, les centristes, peut être vont-ils expérimenter d’autres aventures mirobolantes, un peu inquiétantes, mais je pense qu'(…) il y aura toujours de la résistance ».
Les bureaux de vote doivent rester ouverts jusqu’à 18H00 (17H00 GMT), avec une fermeture à 16H00 dans certaines zones de l’intérieur du pays. Environ 70.000 membres des forces de sécurité seront mobilisés, selon le ministère de l’Intérieur.

Des estimations et sondages sont attendus dans la nuit de dimanche à lundi, mais les résultats préliminaires ne seront annoncés que mardi par l’instance chargée des élections (Isie).
A moins qu’un candidat n’obtienne la majorité absolue dès le premier tour, les partis seront ensuite face au défi de préparer simultanément les législatives du 6 octobre et le second tour de la présidentielle, qui devrait se tenir d’ici le 23 octobre.
Le calendrier électoral, bouleversé par le décès de M. Essebsi quelques mois avant la fin de son mandat, focalise l’attention sur la présidentielle, dont les résultats devraient peser sur la composition du Parlement, prochaine inconnue de taille.

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