Vladimir Poutine rencontre Recep Tayyip Erdogan à Moscou
Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan se retrouvent à Moscou jeudi pour chercher une solution visant à apaiser les tensions en Syrie, qui ont fait planer la menace d’un conflit direct entre la Russie et la Turquie sur le sol syrien.
Cette rencontre intervient alors que des dizaines de soldats turcs ont été tués ces dernières semaines dans d’intenses combats dans la région d’Idlib, ultime bastion rebelle et jihadiste dans le nord-ouest de la Syrie, où la Turquie mène depuis fin février une opération d’envergure contre les forces du régime de Bachar al-Assad.
Ce dernier, appuyé par l’aviation russe, a lancé en décembre une offensive à Idlib, qui a provoqué une catastrophe humanitaire, avec près d’un million de personnes déplacées vers la frontière turque.
Cette escalade des tensions sur le terrain a abouti à des tensions diplomatiques entre Moscou, un allié du régime syrien, et Ankara, soutien des rebelles, en faisant planer un risque d’un affrontement direct entre les deux pays qui se sont imposés comme les principaux acteurs internationaux dans le conflit syrien.
A la veille des discussions avec son homologue russe, M. Erdogan a toutefois affirmé qu’il espérait, lors du sommet à Moscou, obtenir un « cessez-le-feu le plus rapidement possible dans la région » d’Idlib.
Pour sa part, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a émis l’espoir que les deux dirigeants pourraient aboutir, à l’issue de leur rencontre, à une « vision commune » des origines de cette crise et discuter des « mesures communes » à prendre pour y mettre fin.
« Un cessez-le-feu pourrait être annoncé à l’issue des discussions entre MM. Poutine et Erdogan, mais ce ne sera qu’un show », relativise cependant un diplomate occidental.
« Je pense que Poutine dira à Erdogan que c’est fini pour ses actions en Syrie », ajoute-t-il.
« La victoire en Syrie est devenue une question de prestige pour la Russie et pour Poutine personnellement », assure pour sa part Iouri Barmine, analyste du Conseil russe pour les affaires internationales, en laissant entendre que Moscou, qui intervient militairement sur le sol syrien depuis septembre 2015 en soutien au régime de Bachar al-Assad, n’était pas prêt à faire des concessions.
L’escalade des tensions à Idlib, qui a vu notamment la Turquie abattre trois avions du régime syrien et tuer, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme, une ONG, des dizaines de ses soldats, a fait voler en éclats les accords conclus entre M. Poutine et M. Erdogan à Sotchi en 2018 pour faire cesser les combats dans cette région et y instaurer une zone démilitarisée.
Elle a aussi donné lieu à de vifs échanges entre Moscou et Ankara, qui avaient renforcé leur coopération ces dernières années sur le dossier syrien, malgré leurs intérêts divergents.
La Turquie a ainsi accusé la Russie de ne pas respecter les accords de Sotchi, qui prévoyaient les garanties du statu quo sur le terrain et la suspension des bombardements à Idlib.
Pour sa part, la Russie a accusé la Turquie de ne pas remplir sa partie des engagements et de ne rien faire pour « neutraliser les terroristes » dans cette région.
Un point d’orgue dans les accusations mutuelles: le ministère russe de la Défense a affirmé mercredi que les « positions fortifiées des terroristes ont fusionné avec les postes d’observation turcs » déployés à Idlib dans le cadre des accords de Sotchi.
De son côté, la Turquie, qui accueille déjà 3,6 millions de Syriens sur son sol, a réclamé mercredi un soutien européen aux « solutions politiques et humanitaires turques en Syrie », indispensable selon Ankara pour mettre en place une trêve dans ce pays et régler la crise migratoire.
Vendredi, M. Erdogan a ordonné l’ouverture des frontières de son pays, en menaçant l’Europe des « millions » de migrants et y réveillant la peur d’une crise migratoire similaire à celle de 2015.
Des dizaines de milliers de personnes ont depuis afflué vers la Grèce, cet afflux ayant provoqué des heurts entre réfugiés et policiers à la frontière grecque.