Yovanovitch: Mon isolement était fondé sur des accusations infondées
Malgré la guerre déclarée par Donald Trump au Congrès américain, les démocrates ont poursuivi vendredi leur enquête pour constituer un dossier de mise en accusation (« impeachment ») du président républicain, avec l’audition très attendue d’une ancienne ambassadrice des États-Unis en Ukraine. Le suspense avait duré toute la semaine sur la venue ou non de Marie Yovanovitch pour la première audition organisée au Congrès depuis que la Maison-Blanche avait annoncé mardi cesser toute coopération avec les investigations des démocrates.
Mais malgré l’interdiction de la Maison-Blanche, une brèche s’est ouverte pour l’opposition avec, coup sur coup, le témoignage de la diplomate et l’annonce que l’ambassadeur des États-Unis auprès de l’Union européenne, Gordon Sondland, acceptait de venir à son tour jeudi prochain.
« Nous comptons annoncer d’autres témoignages ces prochains jours », s’est réjoui l’un des parlementaires à la tête de l’enquête à la Chambre des représentants, Adam Schiff, dans une lettre aux élus démocrates.
Dénonçant « l’obstruction de la part de la Maison-Blanche », il a de nouveau rappelé que faire entrave à leur enquête pourrait être retenu parmi les motifs de destitution à l’encontre de Donald Trump, comme ce fut le cas pour le président Richard Nixon en 1974.
Avec l’audition de Mme Yovanovitch, les démocrates espéraient en apprendre davantage sur les pressions potentiellement exercées par Donald Trump sur l’Ukraine afin qu’elle cherche des informations compromettantes sur son potentiel rival démocrate Joe Biden.
Cette demande est au cœur de l’enquête ouverte par l’opposition en vue d’une procédure de destitution contre le milliardaire, qui n’est que le quatrième président américain de l’histoire à subir une telle procédure.
Dans le dossier Yovanovitch, les démocrates cherchaient plus précisément à établir si la diplomate avait perdu son poste parce qu’elle n’avait pas coopéré avec la campagne menée par l’avocat personnel de M. Trump, Rudy Giuliani, pour pousser Kiev à enquêter sur les Biden.
A huis clos, l’ex-ambassadrice en Ukraine n’est pas entrée dans le détail de ces soupçons explosifs, d’après les médias américains. Elle a toutefois affirmé que Donald Trump avait fait pression durant des mois pour son rappel à Washington sur la base de « fausses accusations ».
La diplomate de carrière, nommée en Ukraine en 2016 sous le président démocrate Barack Obama, a expliqué que le président était derrière son brusque rappel à Washington en mai.
A l’époque, le numéro deux du département d’État américain, John Sullivan, lui avait expliqué qu’il existait une « campagne coordonnée contre moi, et que le département était sous la pression du président pour me renvoyer depuis l’été 2018 », a-t-elle déclaré aux élus.
Elle a déploré que le gouvernement américain ait pris un telle décision sur la base d’« accusations infondées ».
Cet été, Donald Trump avait justement critiqué Mme Yovanovitch lors d’un échange téléphonique avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, au cœur de l’enquête des démocrates.
C’est à cette occasion que M. Trump avait appelé M. Zelensky à enquêter sur Joe Biden et son fils, Hunter, qui siégea de 2014 à 2019 au conseil d’administration d’un grand groupe gazier ukrainien.
Alors qu’elle avait déjà été rappelée à Washington, Donald Trump avait déclaré au président ukrainien que l’ancienne ambassadrice « n’annonçait rien de bon ». Et d’ajouter : « Il va lui arriver des choses ».
Le dossier a pris une tournure inattendue avec l’arrestation jeudi de deux hommes d’affaires qui ont aidé M. Giuliani dans ses efforts pour convaincre l’Ukraine d’enquêter sur les Biden.
Lev Parnas et Igor Fruman ont été arrêtés dans le cadre d’une enquête distincte sur des violations des lois sur le financement des campagnes électorales. Selon l’acte d’accusation, ils avaient promis de lever des fonds pour un élu du Congrès en lui demandant de convaincre « le gouvernement américain de rappeler l’ambassadrice des États-Unis en Ukraine ».