L’Afrique: Les institutions sanitaires tirent la sonnette d’alarme

Les institutions sanitaires d’Afrique tirent la sonnette d’alarme. Le continent est « très, très proche » de la situation où se trouvait l’Europe 40 jours après le début de la pandémie, a déclaré le Dr John Nkengasong, le directeur du CDC Afrique, l’agence de l’Union africaine spécialisée dans les risques infectieux, aux journalistes. Selon le docteur, le virus « est une menace existentielle pour le continent ».
« Le nombre de cas augmente de façon exponentielle dans la région africaine », précise dans un communiqué le Dr Matshidiso Moeti, directeur régional de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l’Afrique. « Il a fallu 16 jours à partir du premier cas confirmé dans la région pour atteindre 100 cas. Il a fallu 10 jours supplémentaires pour atteindre le premier millier. Trois jours plus tard, il y avait 2000 cas, et deux jours plus tard, nous étions à 3 000 ».

L’Union africaine, via le CDC Afrique, a annoncé 7 028 cas de Covid-19, 284 décès et 561 guérisons dans 50 de ses Etats membres au matin du 3 avril. Selon AP, des experts projettent que le seuil de 10 000 cas pourraient être atteint dans de nombreux pays africains à la fin avril.
L’Afrique du Sud est pour l’instant le pays le plus touché, avec près de 1 500 cas et 5 morts. Il est néanmoins difficile d’évaluer réellement le nombre de cas et les autorités du pays ont reconnu qu’il y avait un retard dans les tests. Pour faire face à la pandémie et ralentir les infections, l’Afrique du Sud a mis en place un confinement parmi les plus stricts au monde, avec l’interdiction de vendre de l’alcool, de courir et de promener son chien. Débuté vendredi 27 mars, ce confinement doit durer au minimum 21 jours. Le Rwanda, premier pays d’Afrique subsaharienne à avoir imposer un confinement, l’a prolongé de deux semaines, signe de ce qui pourrait arriver à d’autres pays. Le Botswana a imposé le sien qui est entré en vigueur ce vendredi 3 avril.

Le continent se prépare au pire. Au Kenya, qui compte pour l’instant 110 cas, 3 décès et 4 guérisons, le gouvernement a déclaré qu’il allait recruter des centaines de nouveaux personnels de santé et que les écoles vides seraient transformées en hôpitaux. Par ailleurs, les membres du groupe de travail kenyan chargé de la lutte contre le coronavirus sont en contact via Internet avec des experts de Wuhan, Pékin, Paris et Dubaï.
Mais les équipements hospitaliers risquent ici aussi de manquer et la pénurie de respirateurs, qui ne touche pas que l’Afrique, s’annonce plus aiguë. En Ethiopie, un pays de plus de 100 millions d’habitants, seulement 54 respirateurs sur un total d’environ 450 ont été réservés aux patients souffrant du coronavirus, selon Yakob Seman, directeur général des services médicaux au ministère de la Santé . En comparaison, l’Etat américain de New York, l’un des épicentres actuels de la pandémie, a dit avoir besoin de milliers de respirateurs pour une population d’environ 20 millions d’habitants.

Les propres prévisions du ministère éthiopien de la Santé prévoient « un scénario du pire » qui verrait le pays avoir besoin de 1 500 respirateurs pour le coronavirus d’ici la fin avril. « Cette pénurie m’inquiète beaucoup », admet M. Seman. « Ce n’est pas à cause d’un manque de volonté du gouvernement, mais à cause d’un manque de ressources. »
Plus dramatique, l’ONG Norwegian Refugee Council rapporte que la République centrafricaine ne disposait que de trois de ces instruments pour 5 millions d’habitants. L’OMS elle-même ne sait pas pour l’instant combien de respirateurs sont disponibles en Afrique pour aider les personnes en détresse respiratoire, a confié le Dr Moeti aux journalistes. « Nous essayons d’obtenir ces informations auprès de collègues basés dans les pays… Ce que nous pouvons dire sans aucun doute, c’est qu’il y a un énorme écart ».

Pour le Dr Nkengasong du CDC Afrique, les autorités cherchent  » énergiquement » à se procurer des équipements tels que des respirateurs et que la fabrication et la réutilisation locales étaient envisagées. « Nous avons vu beaucoup de bonne volonté exprimée par des partenaires bilatéraux et multilatéraux pour soutenir l’Afrique », mais « nous devons encore voir cela se traduire par des actions concrètes », a-t-il déclaré.
Par ailleurs, les mesures de confinement mises en place par certains pays ne sont pas sans risques pour l’économie et les populations du continent. L’OMS rappelle que de nombreux habitants du continent vivent dans des conditions de forte densité de population ou travaillent dans le secteur informel et doivent gagner de l’argent quotidiennement pour survivre.

Il est donc important que les pays prennent des dispositions pour garantir que les gens puissent toujours accéder aux services essentiels. « Pour que les mesures contraignantes [contre la pandémie] soient efficaces, elles doivent être accompagnées de mesures de santé publique fortes, soutenues et ciblées qui permettent de localiser, d’isoler, de tester et de traiter les cas de Covid-19 », a souligné le Dr Moeti.

Par ailleurs, des organisations craignent que la pandémie perturbent la livraison et l’acheminement de l’aide internationale dont dépend certains sur le continent. « Il est vital que les ports continuent à fonctionner pour recevoir de la nourriture et d’autres cargaisons humanitaires essentielles, que les frontières et les routes restent ouvertes afin de pouvoir les transporter là où elles sont le plus nécessaires et que les distributions aux personnes vulnérables soient effectuées en toute sécurité », a déclaré Mme Castro, directrice régionale du Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM) pour le sud de l’Afrique. « Il est également crucial que la communauté internationale fournisse rapidement les fonds considérables nécessaires pour maintenir et renforcer les programmes d’assistance ». Actuellement, 32 pays africains sur 55 ont totalement fermés leurs frontières frontières terrestres, aériennes et maritimes.

par: Arab Observer

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